En cas de victoire du NFP ou du RN, la fiscalité des dons des plus « aisés » serait impactée par un retour de l’ISF ou par un nouvel IFF (« Impôt sur la Fortune Financière ») proposé par le RN. Le mécénat d’entreprise pourrait être aussi concerné.
Les taux sont encore mal connus mais ils inquiètent autant les donateurs que leurs bénéficiaires.
On peut raisonnablement penser que la fiscalité du don « classique » aux associations d’intérêt général, déductible à 66%, comme celle de 75 % vers les associations d’aide aux plus démunis, ne devraient pas évoluer de façon significative.
Les « dons-IFI » étaient en croissance, surtout vers les fondations
En revanche, en cas de victoire du NFP ou du RN, l’évolution des « dons-IFI », déductibles à 75 %, est en jeu.
La disparition des « dons-ISF » en 2017, principalement vers les fondations, avait mécaniquement réduit de 350 000 à 200 000 les foyers imposables. Avec pour conséquence une baisse des dons de 270 millions d’euros en 2017 à 110 millions environ en 2018.
Puis les « dons-IFI » étaient progressivement repartis à la hausse. L’étude annuelle de « Recherche et Solidarité » en 2023 évaluait ceux-ci à 203 millions, soit 75 % des ressources issues antérieurement des dons-ISF.
Les fondations retrouvaient presque leurs ressources, tandis que les fonds de dotation non éligibles à ce type de dons, continuaient à se développer. Le taux moyen de dons par foyer était, de fait, plus positif (371 € en moyenne pour l’ensemble des Français et 2686 € pour hauts revenus), selon l’étude de Apprentis d’Auteuil en 2024.
Une double incertitude pour les dons des hauts revenus et des entreprises
Dans un contexte de redistribution sociale et d’une très probable augmentation des impôts, les dons importants risquent de baisser mécaniquement. Si on y ajoute une remise en cause des défiscalisations des dons à 75 %, tout comme des legs, une forte inflexion est probable.
Cela remettrait très probablement en cause le succès des dons aux grandes fondations comme des fondations abritées par celles-ci. Et, de fait, les ressources des associations.
Quant au mécénat d’entreprise, il a atteint, selon Admical, un record de succès à 2,3 milliards de dons en 2021. Le taux de 60 % de réduction d’impôt jusqu’à 2 millions de dons, déjà critiqué par la Cour des Comptes, pourrait être remis en question. Il aurait aussi une incidence directe sur les ressources des associations et des fondations bénéficiaires.
Une évolution positive des motivations des donateurs depuis quelques années
Le retard pris dans l’évolution de la croissance du mécénat français avait conduit à la très avantageuse « Loi Aillagon » de 2003, initiée par le Ministère de la Culture de l’époque.
Depuis, les objectifs et les attitudes des entreprises mécènes ont beaucoup évolué. En dominante, le mécénat ainsi que les fonds et fondations des entreprises sont de moins en moins gérés par les directions de la communication mais plutôt par celles de la RSE, et de plus en plus en lien avec les DRH.
L’engagement sociétal et la dynamisation interne sont essentiels. Beaucoup disent que les avantages fiscaux n’ont plus qu’une incidence secondaire. Mais ils ont une part importante dans le volume des dons versés.
Il en va de même pour les personnes fortunées. Les mentalités ont changé depuis quelques années avec le développement d’une philanthropie beaucoup plus active. L’engagement philanthropique individuel, comme familial, traduit une volonté d’agir concrètement dans la réalisation projets d’’intérêt général ayant un réel impact. La croissance des fondations familiales en est l’illustration.
Des changements temporaires dans le volume des dons aux bénéficiaires ?
Il est probable que le retour de ISF (ou l’arrivée de l’IFF) aurait un effet immédiat sur l’inflexion des dons des particuliers. Mais si sa fiscalité était maintenue, le « Don-ISF » pourrait avoir de nouveau un « effet repoussoir » : plutôt soutenir une cause que cet impôt supplémentaire ! Le passage au « Don-IFI » avaient eu un effet de baisse mais les dons remontaient depuis. Un temps d’arrêt se fera sentir dans tous les cas.
Mais, au-delà de ces considérations fiscales, les acteurs associatifs et leurs bénéficiaires pourraient en payer, les premiers, le prix fort. La baisse globale des dons, s’ajoutant à la chute des subventions, pourraient avoir une incidence vitale pour les plus fragiles d’entre-eux.
Rien n’est joué ni acté, même au-delà des élections. Mais le sujet n’est pas secondaire dans l’intérêt général de tous.
Stéphane Godlewski
Président de l’Agence DoYouPhil